C'est l'histoire d'une montagne qui crève les yeux lorsqu'on est à l'Alpe d'Huez ou aux deux Alpes... Elle est là, elle nous regarde avec son oeil si caractéristique. Elle veille sur la vallée de
Bourg d'Oisans avec son épine de rascasse et son glacier quasi himalayen, toute proportion gardée...
Mais voilà, elle n'a pas très bonne réputation auprès des alpinistes... Approche interminable et rocher pêteux n'attirent pas les foules. La face est considérée (à tort selon moi...) comme austère
et peu logique.
Par contre, elle est tellement belle cette montagne... Et puis au moins, on aura était tranquille avec Jean-Claude !
Après une ascension un peu foirée à cause du monde à la montagne des Agneaux, nous avons décidé de nous venger sur un sommet qui nous attirait énormément tout les deux, malgré sa réputation. C'est
également un bon moyen de passer du temps ensemble, de voir comment fonctionne notre cordée, pour peut être d'autres objectifs plus tard.
Autant le dire tout de suite, l'ascension de la roche de la Muzelle est une vraie bambée !
C'est partie pour les chiffre, attention au mal de crâne :
- Le premier jour pour monter au refuge : 1210 m D+, sur un sentier fort raide par endroit et un beau plateau au milieu. Bagatelle pense-t-on ! Pas vraiment... 3h00 nous sont nécessaires pour les
avaler.
- Le deuxième jour, approche + difficultés : 1350 m D+. Encore une fois, on peut penser que ce n'est qu'une formalité, mais c'est sans compter sur une arête finale qui rend la progression assez
lente.
Sans oublier pour le deuxième jour, le redescente des 2560m D- !
- Au total, 5120m de dénivellé cumulée en deux jours, ça commence à faire long, mine de rien.
Bref, le deuxième jour, l'approche + les difficultés nous prendront quasiment 12h00 d'effort pour faire l'aller-retour "sommet-refuge" et 2h15 pour "refuge-parking".
Presque 14h00 à marcher/escalader sur une journée, on ne le ferait pas tout les jours... Mais au final, quelle satisfaction !
Il n'y aura qu'une seule autre cordée pour nous accompagner, et encore, malgré leurs âges évalués à une soixantaine d'année, ils iront tellement vite sur l'arête que nous ne nous gênerons
jamais !
J'ai ressorti quelques vieilles photos, faites depuis deux sommets voisins "muraillette + aiguille de Venosc" lors d'un enchainement à la journée pendant l'automne 2007. Il y' avait un peu de
neige, mais elles montrent bien l'ampleur de la tâche.
Le sommet de la roche de la Muzelle :
L'itinéraire en pointillés rouge à la monté et bleu pour la descente, histoire de changer un peu :
Retour en 2009, cette fois c'est parti ! Levé à 4h00 au refuge, le soleil arrive vers 6h00, l'heure de la première 'tite pause photo, même si on ne traîne pas :
Après avoir pris l'option "approche par l'arête" plutôt que par le glacier, on arrive tout près du col Jean Martin qui permet de rejoindre l'arête :
Le soleil commence à éclairer les montagnes aux alentours :
On enfile les crampons et c'est parti pour le petit morceau de glacier. Jean Claude passe devant, nous alternerons le rôle de premier à plusieurs reprises :
Le glacier encore bien enneigé, il y'a quelques trous, il faut rester vigilant :
On atteint le col Jean Martin, avec un peu de glace pour atteindre le rocher. Deux spits nous accueillent, mais pour le reste, c'est une escalade traditionnelle de niveau modeste (passages en
3+/4), mais dans un rocher... disons... pas franchement compact. Il faut vraiment faire attention ... :
Pas le temps de prendre des photos sur l'arête. Nous essayons de progresser rapidement pour finalement atteindre le sommet à 10h45 (3465 m). Yyyyyyeeeeesssssssssss !!! La vue est sympa ;o) !
A droite : Venosc, les deux Alpe. Au centre : l'alpe d'Huez. Dans le fond à gauche : la plaine de Bourg d'Oisans (non, on ne voit pas ma maison. ;o)) :
Au premier plan, l'arête d'où nous arrivons. Le rocher semble vraiment excellent, n'est-ce pas ?? ;o) Au fond, le glacier des deux Alpes, on distingue le Râteau, La Meije face sud, le vallon de la
Selle... Au fond à gauche, on aperçoit même le Mont Blanc :
Le vallon de Lanchâtra au premier plan, tout au fond le versant Bonnepierre du Dôme de Neige et de la Barre de Ecrins (il faut avoir l'oeil, j'avoue...) :
Le Vallon de Valsenestre, direction les Alpes du Sud et la Matheysine. On distingue l'Obiou :
La pause au sommet fut brève, la descente nous atttends. Je serai beaucoup moins efficace qu'à la monté... Probablement déshydraté, les derniers mètres sont vraiment pénible et je me fais un peu
traîner pas Jean Claude, notamment au niveau des rappels. Je guenille mes manip' (pourtant pas compliquées et répétées 1000 fois...), perds en lucidité (je râle...), suis lent, coince la corde...
Bref, impression de gros boulet, le chrono tourne, il était temps que ça se termine !
On était là haut, on a presque l'impression que c'est plat et pas long, tellement la photo écrase les perspectives... :
Au final, un sommet à l'altitude modeste (3465m), mais qui ne se laisse vraiment pas faire et qui propose un bon ensemble de difficultés alpines. Je n'y retournerai peut être pas demain-la-veille,
mais je suis vraiment hyper content de cette réalisation qui me tenait à coeur depuis .... un bon nombre d'années !